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CONCLUSION.

parler sérieusement, mon cher Dumais, vous me rendriez très malheureux si vous me refusiez.

– S’il en est ainsi, monsieur, dit Dumais avec des larmes dans la voix, j’accepte vos dons que j’aurais, d’ailleurs, mauvaise grâce de refuser d’un homme comme vous.

Laissons de Locheill s’occuper activement d’enrichir Dumais, et retournons à nos autres amis.

Le bon gentilhomme, presque centenaire, ne vécut qu’un an après l’arrivée de Jules. Il mourut entouré de ses amis, après avoir été l’objet des soins les plus touchants de Blanche et de son frère, pendant un mois que dura sa maladie. Quelques moments avant son décès, il pria Jules d’ouvrir la fenêtre de sa chambre, et jetant un regard éteint du côté de la petite rivière qui coulait paisiblement devant sa porte, il lui dit :

— C’est là, mon ami ; c’est à l’ombre de ce noyer que je t’ai fait le récit de mes malheurs ; c’est là que je t’ai donné des conseils dictés par l’expérience que donne la vieillesse. Je meurs content, car je vois que tu en as profité. Emporte après ma mort ce petit bougeoir : en te rappelant les longues insomnies dont il a été témoin dans ma chambre solitaire, il te rappellera aussi les conseils que je t’ai donnés, s’ils pouvaient sortir de ta mémoire.

— Quant à toi, mon cher et fidèle André, continua M. d’Egmont, c’est avec bien du regret que je te laisse sur cette terre, où tu as partagé tous mes chagrins. Tu seras bien seul et isolé après ma mort ! Tu m’as promis de passer le reste de tes jours avec la famille d’Haberville : elle aura le plus grand soin de ta vieillesse. Tu sais qu’après ton décès les pauvres seront nos héritiers.