Page:De Gaspé - Mémoires. 1866.djvu/219

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vie à ce vil reptile qui, en déposant sa vieille enveloppe, se trouve tout à coup muni d’une nouvelle peau beaucoup plus flexible que la première.

La conscience : Ce n’est qu’un accessoire, mon fils ; parlons de choses plus sérieuses.

Moi : Vous en parlez à votre aise, madame : on voit bien que vous ne sentez pas les tourments que j’endure : d’abord……

La conscience : Bagatelles que tout cela ! purs accessoires ! venons au principal. Tu as fait une gageure plus bête que celle du badaud dont tu t’es si fort moqué, en jetant le gant à toute la garnison de Québec. Si tu es vaincu, il te faudra avoir recours à ton père, lui faire l’aveu de tes méfaits, et il se mettra dans une colère épouvantable. Il t’accorde généreusement, et même plus qu’il ne devrait faire, une somme assez considérable pour les menus plaisirs d’un jeune homme de ton âge, et tu es toujours au dernier sou par tes prodigalités.

Moi : C’est une dette d’honneur qu’il s’empressera de payer.

La conscience : D’accord ; il est trop honorable pour en agir autrement ; mais sa colère n’en sera que plus terrible en pensant qu’il paie tes folies pour faire rire les autres à tes dépens : car il a une haute opinion de son cher fils Philippe.

Moi : Je lui dirai, pour le désarmer, de déduire quarante guinées sur la somme qu’il m’alloue pour mes menus plaisirs.

La conscience : Tu as du bon, mon fils ; je te pardonne, moi : puisse ton cher père en faire autant !