Page:De Gaspé - Mémoires. 1866.djvu/252

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reins ; et malgré nos lazzis, il avait toujours les rieurs de son côté.

Painchaud, en faisant ses devoirs les plus sérieux, oubliait rarement d’y introduire un mot, ou une phrase qui pût nous faire rire. Le régent nous avait donné un jour pour sujet de composition le nemo suâ sorte contentus d’Horace. Painchaud après avoir traité le sujet à sa façon, en traçant un tableau où beaucoup d’écoliers de notre classe avaient le plaisir de se reconnaître, sans néanmoins oser s’en offenser ; après avoir fait désirer à ceux qui avaient le regard louche de regarder droit devant eux, à ceux qui avaient le nez trop long de l’échanger pour un nez passable, après avoir fait souhaiter à l’un du beau temps quand il pleuvait, de la chaleur quand il faisait froid, de la neige pour glisser quand elle était tardive, et à l’encontre du petit Fleury de l’inimitable Berquin, leur avoir toujours fait souhaiter la saison ou le temps dont ils ne jouissaient pas, finit par cette phrase burlesque : « Et quand le bon Dieu nous enverrait les quatre temps nous ne serions jamais satisfaits. »

Le régent trouvait que la phrase n’avait pas le sens commun, tandis que Painchaud, tout en nous faisant des clins d’œil, soutenait gravement qu’elle avait une portée philosophique très profonde. Et cela au milieu des éclats de rire de toute la classe. Il avait atteint son but.

Ce qui n’a pas empêché Monsieur le Docteur Painchaud de faire de brillantes études ; et d’être aujourd’hui un de nos citoyens distingués de la ville de Québec, où il s’est acquis par ses talents et son assiduité comme