Page:De Gaspé - Mémoires. 1866.djvu/277

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délinquant trente-neuf coups de fouet. Celui-ci laissa sa roulette au greffe de la paix et prenant ses jambes à son cou, s’empressa de sortir des murs de cette ville inhospitalière en criant, « je me sauve à Montréal, on fesse ici pour rien ! »

Fletcher, présidant une autre fois la cour des sessions trimestrielles, voulut faire le procès à un homme accusé d’un crime entraînant peine de mort sur conviction, mais comme les deux autres juges qui siégeaient avec lui menacèrent de le laisser seul sur le banc, il fallut à son grand regret y renoncer.

Qu’on ne croie pas que Fletcher en agissait ainsi par ignorance : oh ! non ! Il avait toujours un vieux statut anglais tombé en désuétude, mais qui n’avait pas été révoqué, et derrière lequel il se retranchait.

C’était certainement un homme d’une vaste érudition : une encyclopédie vivante, comme on disait alors.

Mais je reviens à des compagnons anglais plus aimables. Messieurs John Ross[1] et John Gawler Thomson[2] nés, et élevés dans la ville de Québec, avaient toute la gaieté des Canadiens-français. Je citerai une petite scène du premier qui nous amusa beaucoup.

Il pouvait être dix heures du soir, par une magnifique soirée du mois de juillet ; quelques amis, et j’étais du nombre, avaient dîné chez Ross, dont la maison située dans la rue du Palais, vis-à-vis le mur de l’Hôtel-Dieu, était à une centaine de pieds de la sentinelle stationnée

  1. John Ross, Avocat, mort protonotaire de la cour du Banc du roi à québec.
  2. L’Honorable John Gawler Thompson, maintenant juge à Gaspé.