Page:De Gaspé - Mémoires. 1866.djvu/344

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sécution si cruelle de la part du gouvernement britannique. Je jette, aujourd’hui, le gant au torie le plus farouche, pourvu qu’il ait quelque teinture de la constitution anglaise, et je veux passer pour le plus sot individu du Canada, s’il peut me montrer une phrase, une seule phrase dans ce journal qui pût motiver les rigueurs de l’oligarchie sous l’administration Craig.

Pendant ce règne de terreur, le trait de désintéressement, de générosité qui va suivre, est trop honorable pour que je le passe sous silence.

Monsieur Joseph Planté, membre du parlement, inspecteur du domaine du roi et greffier du Papier Terrier, fut destitué pour les mêmes griefs que ceux dont j’ai parlé précédemment. Frappé de cette injustice, ce grand et loyal patriote sollicite et obtient une audience du chevalier Craig lui-même, et plaide sa cause avec tant de bonheur, que le gouverneur, qui n’était peut-être pas aussi diable qu’on l’a peint, reconnut son innocence, ajoutant, néanmoins, qu’il était trop tard ; qu’il avait nommé Monsieur Olivier Perrault pour le remplacer ; que si cependant, ce qui n’était guère probable, le nouveau greffier consentait à envoyer sa démission, il serait prêt à le réintégrer dans sa place.

Monsieur Perrault se rendit auprès du gouverneur, après une entrevue avec M. Planté :

— Excellence, dit-il, j’ai accepté avec reconnaissance la place dont vous m’avez gratifié, mais il me répugne de profiter du malheur d’autrui, et je prie Votre Excellence de vouloir bien accepter ma résignation.

Sir James Craig, touché d’un acte de générosité qui lui permettait de réparer une injustice, donna à mon-