Page:De Gaspé - Mémoires. 1866.djvu/347

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du barreau. Quelqu’un lui fit observer un jour que M. Borgia, qui avait plaidé devant lui, le matin, n’était pas naturellement éloquent : « C’est vrai, dit-il ; mais je crois qu’il y a peu d’avocats dans cette colonie qui aient une connaissance aussi profonde du droit romain. Et sir James ne se trompait pas.

Il était de bonne foi lorsqu’il sanctionna les mesures tyranniques de son conseil ; sa conduite comme commandant de garnison le prouve. Il croyait à une rébellion imminente des Canadiens-Français, lorsque les Bédard, les Blanchette et autres furent écroués. Dès quatre heures de relevée il fit doubler les gardes à tous les postes importants de la ville de Québec, fit poser un piquet d’hommes vis-à-vis l’arsenal, et envoya chercher l’adjudant-général de la milice canadienne, feu mon oncle Baby, et lui dit qu’il serait à propos de mettre à l’abri de toute surprise un petit dépôt d’armes d’une cinquantaine de fusils à l’usage des miliciens dans une bâtisse adjacente à l’évêché, près de la porte Prescott.

— Si Votre Excellence, lui dit M. Baby, âgé alors de plus de soixante-dix ans, a quelque inquiétude sur ce dépôt d’armes, j’irai moi-même y coucher seul cette nuit.

Cette réponse piquante fit pâlir le général, et il tourna le dos au septuagénaire sans lui répondre. Je dois à la vérité de l’histoire de dire que mon cher oncle, après cette réponse si mordante, n’en sanctionna pas moins le soir même les mesures cruelles du Conseil Exécutif par sa présence et par sa signature. Je dois ajouter pour sa justification qu’il était difficile à un vieillard qui n’a-