Page:De Gaspé - Mémoires. 1866.djvu/356

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verain juge, s’il m’est donné de rejoindre l’ange de vertu qui embelli le peu de jours heureux que j’ai passés dans cette vallée de tant de douleurs, nous prierons ensemble pour la nombreuse postérité que nous avons laissée sur la terre.

Je retourne à la fête où m’attend le lecteur. Il est deux heures et demie, nous sommes au milieu d’une contredanse des plus gaies, speed the plow, peut-être ; l’orchestre cesse tout à coup de jouer ; les uns restent les bras étendus, les autres une jambe en l’air, tout en cherchant à deviner ce qui cause ce contretemps. L’arrivée des deux évêques, Monseigneur Plessis et le Lord Bishop Mountain, nous donne le mot de l’énigme ; en effet un aide-de-camp avait d’un signe imposé silence à l’orchestre en voyant s’avancer les deux grands dignitaires de leurs églises respectives. La danse avait cessé pour ne recommencer qu’après le départ des deux évêques. Sir James par égard pour leur caractère avait établi cette étiquette.

À trois heures le son d’un cor se fait entendre dans le lointain, et tout le monde s’enfonce à la suite du gouverneur dans un sentier pratiqué dans la forêt, alors vierge, de Powell-place. Quelques personnes, vu la longueur de la promenade, commençaient à croire que sir James faisait faire un tour d’appétit, avant le dîner, aux convives qui n’avaient pas pris part à la danse, quand au détour d’un sentier, une immense table couverte d’un dôme de feuilles de différentes espèces apparaît tout à coup comme une oasis bienfaisante. En effet M. Petit, chef de cuisine de son excellence, s’était surpassé pour l’occasion, et,