Page:De Gaspé - Mémoires. 1866.djvu/364

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ques de son habit galonné. Et comme uncle sam[1] n’osa pas les débusquer de ce retranchement inexpugnable, il se contenta de penser en lui-même, je suppose, que le gouverneur britannique n’avait pas volé le sobriquet de petit roi Craig.

Mais je retourne sur mes pas. Étant informé qu’il fallait une lettre de passe pour visiter l’arsenal de marine et de vaisseaux de guerre à New-York, nous demandâmes à un jeune lieutenant nommé Taylor, dont nous avions fait la connaissance à table d’hôte dans un hôtel de cette ville, quelle démarche il fallait faire pour satisfaire notre curiosité, et il nous fit réponse qu’il nous y conduirait lui-même le lendemain. Il nous parut néanmoins que la recette d’admission était très-simple, car il se contenta de nous dire à l’oreille en mettant le pied sur la première frégate que nous visitâmes : recollect that we are all yankees here. (Rappellez-vous que nous sommes tous Yankees ici).

Nous vîmes sur le lac Champlain un spectacle assez humiliant pour des sujets britanniques ; celui du pavillon américain flottant avec orgueil au-dessus du pavillon anglais aux mâts de notre flotte conquise pendant la guerre de 1812. Aussi mon ami Christie craignant quelques brocards à notre adresse crut devoir aborder franchement la question en parlant le premier de notre désastre, mais, à notre grande surprise, nos amis yankees se contentèrent de dire : fortune de guerre ! et changèrent de conversation.

Après avoir passablement battu la campagne, je reviens

  1. Uncle sam : un autre sobriquet que l’on donnait aux américains.