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CHAPITRE SEIZIÈME


Nous sommes au mois de décembre, de l’année mil-huit-cent-soixante-cinq ; j’ouvre une des cases de ma mémoire pour m’informer des événements qui occupaient les bons citoyens de la ville de Québec, pendant le même mois de l’année mil-huit-cent-six ; et je vois avec autant de surprise que de chagrin, qu’après un laps de cinquante-neuf ans, l’esprit des masses est toujours le même. Les aveugles, les sourds, les boiteux, les malades et les infirmes canadiens-français, assiégeaient alors jour et nuit la porte d’un grand thaumaturge, sortant de je ne sais d’où, qui guérissait les malades, par l’imposition des mains.[1] Le clergé avait beau

  1. La marquise de Créquy rapporte dans ses « souvenirs » qu’un charlatan, peu d’années avant la révolution, obtenait le même succès par l’imposition des mains : ce qui montre que les badauds de Paris étaient aussi niais que nos badauds canadiens : c’est toujours une consolation. Il y a encore aujourd’hui dans nos campagnes des imposteurs qui, au dire de leurs dupes, font des cures merveilleuses ; c’est ce qui s’appelle guérir du secret.