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Page:De Gaspé - Mémoires. 1866.djvu/57

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MÉMOIRES.

sait déjà tant de ravages. Peu importe ; j’aime cette naïve confiance. Que nos bons Canadiens conservent toujours la foi vive de leurs ancêtres, source de tant de consolations dans cette vallée d’amertume !

J’étais encore à la même place occupé à écouter ce que disaient ces femmes, lorsque quelqu’un cria : L’église des récollets est en feu !

Je ne fis qu’un saut ; mais lorsque j’arrivai sur les lieux, le toit n’offrait plus déjà qu’une masse de flammes. Le couvent et les bâtisses adjacentes furent, aussi, bien vite réduits en cendre.

Pendant quelques jours, à la suite de ce désastre, on vit errer les pauvres moines près des ruines du monastère, dans lequel ils avaient trouvé un asile contre la tourmente de la vie. Ils se promenaient, tristes et pensifs, près des voûtes où ils avaient espéré que leurs cendres seraient mêlées avec celles de leurs devanciers qui avaient rendu tant de services à la Nouvelle-France.

Un mois après ce sinistre, on voyait à peine trois capuchons dans toute la ville de Québec : les fils de Saint-François, dispersés dans toute la colonie, gagnaient paisiblement leur vie comme les autres citoyens. Ceux des moines qui avaient fait des études, comme le frère Lyonnais, prirent la soutane et furent ordonnés prêtres ; ceux qui avaient une instruction suffisante, dirigèrent des écoles, et les autres s’occupèrent de travaux mécaniques ou d’agriculture. Chose assez extraordinaire ! la langue empoisonnée de la calomnie ne chercha jamais à ternir la réputation de ces hommes vertueux.