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VOYAGE DE LA BELGICA.

Le grand pétrel, lourd, disgracieux et laid, est également un des principaux habitants de ces lieux.

Cet oiseau, dont le plumage varie, suivant les individus, du blanc sale au brun le plus foncé, est le plus grand des oiseaux antarctiques proprement dits ; ses ailes atteignent parfois jusqu’à deux mètres d’envergure. Armé d’un bec puissant, il peut entamer la peau des cadavres de phoques qu’il rencontre sur la glace ou sur les plages. Dès que nous avions tué un phoque — la science a de cruelles exigences — nous pouvions voir les grands pétrels surgir des quatre points cardinaux ; et ils n’attendaient pas toujours que nous eussions quitté les lieux du drame pour profiter de l’aubaine, et se gorger de chair et de sang jusqu’à ne plus pouvoir s’envoler.

PÉTREL GÉANT
PÉTREL GÉANT

La gent ailée est encore représentée dans ces régions désolées par le beau goéland dominicain blanc-gris, avec les ailes et une partie du dos brun foncé, le bec et les pattes jaunes ; les sternes blancs, aux ailes effilées, gracieux au possible ; le pétrel des neiges, tout blanc aussi, avec les pattes et les yeux noirs ; les damiers ou pigeons du Cap ; l’oiseau des tempêtes qui ressemble à l’hirondelle dont il a la taille et le vol élégant, et d’autres encore.

Si les régions antarctiques ne sont habitées ni par l’ours blanc, ni par le bœuf musqué, ni par aucune espèce de renard ou de renne, en un mot par aucun des mammifères que l’homme poursuit sur les terres boréales, elles n’en ont pas moins leur faune terrestre. En vérité, elle est minuscule et rarissime, cette faune terrestre antarctique, et c’est peut-être ce qui lui a valu d’échapper aux investigations de nos prédécesseurs.

Pour la décrire, simple profane, je céderai encore la plume à mon camarade Racovitza qui eut l’honneur d’en découvrir l’existence :