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Page:De La Nature.djvu/145

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ôterez les douceurs de l’amour, les délices de l’union des cœurs, vous émousserez ses sens, vous en userez les ressorts ; par trop de jouissance, vous le mettrez dans une impossibilité affreuse de jouir. En augmentant ses trésors & sa dépense, la délicatesse de sa table & l’affluence des convives, le nombre de ses chevaux & des gens de sa suite, de ses courtisans & de ses adorateurs, vous multiplierez ses craintes & ses espérances, son ambition & ses envieux, ses affaires & ses sollicitudes. Vous lui ravirez le sommeil, la liberté, la santé. Vous armerez sa conscience pour lui reprocher que ses chevaux & sa meute consument la subsistance de mille hommes ; qu’il a changé en prairies ses terres labourées ; que ses jardins & ses plaisirs ont envahi le terrain qui nourrissoit deux paroisses entieres. Excedé de la veille, inquiet du lendemain, peut-il goûter le présent ?

Le ministre à la tête du gouvernement, manque de la premiere chose requise pour être heureux. Il n’est point à lui-même. Occupé d’affaires qui ne sont pas les siennes, il répond de ses fautes, & de celles dont on le soupçonne. Il est entouré de flatteurs, d’importuns, d’ennemis cachés. Il a beau être éclairé, actif, vigilant, zelé, integre ; il y a toujours des mécontens qui le déchirent, des envieux qui le déservent, de faux