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Page:De La Nature.djvu/192

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l’exercer, convienne à la délicatesse des organes ; que la présence des objets ou de leurs similaires en rende la perception plus facile, sans quoi, loin d’aider l’esprit, on le frapperoit d’une stupeur lourde, propre à engourdir les plus heureuses dispositions.

Je conviens qu’il nous faut oublier dans la suite les contes dont notre enfance a été bercée, & changer entiérement de façon de penser. Mais le tems amenera peu-à-peu cette substitution d’idées. Nos premieres conceptions, toutes frivoles qu’elles étoient, nous ont pourtant accoutumés à penser. Leur frivolité étoit nécessaire, parce que nous étions incapables de nous occuper de quelque chose de mieux. Forcés de commencer par ce qu’il y a de plus simple, nous aurions aujourd’hui une grande difficulté à raisonner sensément, si dès notre bas âge nous n’avions pas raisonné & pensé en enfans. L’esprit se développe comme le tempérament, le corps s’organise successivement : il passe par plusieurs états avant d’être tout-à-fait formé. L’entendement a aussi son tems d’imbécillité, pendant lequel il faut le traiter doucement, & n’exiger de lui que des opérations puériles. La nature y a pourvu en donnant aux femmes avec qui nous passons nos sept à huit premieres années, un goût décidé pour la bagatelle,