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Page:De La Nature.djvu/82

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est subitement remplacée par une nouvelle existence du même ordre. Donc les créatures perdent à chaque moment autant d’existence qu’elles en reçoivent.

Quand l’univers passa du néant à l’être, il y avoit une distance infinie de l’état où il étoit à celui qu’il prenoit, de la non-existence à l’existence. Il ne falloit pas moins qu’une puissance infinie pour lui faire franchir cet intervalle. L’univers fut ; c’est le premier moment. De celui-ci au second, il y a encore toute la distance possible, une distance infinie : comme les intervalles de la suite naturelle des nombres renferment une infinité de nombres. Ainsi l’univers étoit aussi insuffisant de lui-même à exister dans le second instant que dans le premier, & il ne put passer du premier au second, ni du second au troisieme, etc., que par une puissance infinie qu’il n’avoit pas. Loin qu’il y ait aucune connexion entre l’instant actuel de son existence & celui qui l’a précédé, ou celui qui le suivra ; il y a au contraire entre chacun de ces trois instans tout l’éloignement qu’il peut y avoir. D’où je conclus que cela fait trois existences ou trois portions de l’existence tout-à-fait différentes, dont chacune exclut les deux autres, ensorte que l’univers doit absolument perdre l’une pour recevoir l’autre.