Page:De Lamennais - Paroles d'un croyant, 1838.djvu/109

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Les pères diront à leur fils : Nos premiers jours ont été troublés, pleins de larmes et d’angoisses. Maintenant le soleil se lève et se couche sur notre joie. Loué soit Dieu qui nous a montré ces biens avant de mourir !

Et les mères diront à leurs filles : Voyez nos fronts, à présent si calmes ; le chagrin, la douleur, l’inquiétude y creusèrent jadis de profonds sillons. Les vôtres sont comme, au printemps, la surface d’un lac qu’aucune brise n’agite. Loué soit Dieu qui nous a montré ces biens avant de mourir !

Et les jeunes hommes diront aux jeunes vierges : Vous êtes belles comme les fleurs des champs, pures comme la rosée qui les rafraîchit, comme la lumière qui les colore. Il nous est doux de voir nos pères, il nous est doux d’être auprès de nos mères ; mais quand nous vous voyons et que nous sommes près de vous, il se passe en nos âmes quelque chose qui n’a de nom qu’au ciel. Loué soit Dieu qui nous a montré ces biens avant de mourir !

Et les jeunes vierges répondront : Les fleurs se fanent, elles passent ; vient un jour où ni la rosée ne les rafraîchit, ni la lumière ne les colore plus. Il n’y a sur la terre que la vertu qui jamais ne se fane ni ne passe. Nos pères sont comme l’épi qui se remplit de grains vers l’automne, et nos mères comme la vigne qui se charge de fruits. Il nous est doux de voir nos pères, il nous est doux d’être au-