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Page:De Merejkowsky - Le Roman de Léonard de Vinci, 1907.djvu/111

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Un faucon blanc de Chypre, constellé d’émeraudes, coiffé d’un bonnet d’or, se dressait sur sa main gauche. Des grelots disparates sonnaient aux pattes de l’oiseau, et permettaient de le retrouver s’il se perdait dans les brouillards ou dans les herbes marécageuses.

La duchesse était gaie. Elle avait envie de folâtrer, de rire et de galoper. Ayant adressé un sourire à son mari, qui n’eut que le temps de lui crier : « Prends garde, le cheval est vif ! » elle fit signe à ses compagnons et lança sa bête au galop, d’abord sur la route, puis dans les prés, sautant les fossés, les buttes, les haies. Béatrice allait toujours de l’avant, avec son énorme dogue favori, et à ses côtés, sur une noire jument d’Espagne, la plus gaie, la moins peureuse de ses demoiselles d’honneur, Lucrezia Crivelli.

Le duc, en secret, n’était pas indifférent pour cette Lucrezia. Maintenant, l’admirant ainsi que Béatrice, il ne pouvait décider laquelle des deux lui plaisait davantage. Pourtant ses craintes étaient pour sa femme. Quand les chevaux sautaient les fossés, il fermait les yeux pour ne pas voir et s’arrêtait de respirer.

Le More grondait sa femme pour ses extravagances, mais ne pouvait se fâcher. Il manquait d’audace, aussi était-il fier de la bravoure de Béatrice.

Les chasseurs disparurent derrière le rideau de roseaux qui bordait le Ticcino où gîtaient les canards sauvages, les bécasses et les hérons.