— Non, même si ces fruits viennent de mon jardin. Je comprends d’où viennent ces allusions. En désirant étudier l’effet des poisons, je voulus rendre un pêcher vénéneux. J’ai dit à mon élève Zoroastro da Peretola que les pêches étaient empoisonnées. Mais l’essai n’a pas réussi. Les fruits sont inoffensifs. Mon élève, trop pressé, a dû raconter à quelqu’un…
— Voilà, voilà, je le savais bien, s’écria joyeusement le duc, personne n’est cause de ma mort ! Et cependant, ils se soupçonnent tous entre eux, se détestent et se craignent. Oh ! si on pouvait leur dire tout, comme je le fais avec toi ! Mon oncle se croit mon meurtrier, et je sais qu’il est bon, mais faible et timide. Et pourquoi me tuerait-il ? Je suis prêt moi-même à lui transmettre mes pouvoirs. Je n’ai besoin de rien. Je serais parti loin, j’aurais vécu dans la solitude avec des amis. Je me serais fait moine ou encore ton élève, Léonard. Mais personne n’a voulu croire que je ne regrettais pas le trône. Et pourquoi ont-ils fait cela maintenant ? Ce n’est pas moi qu’ils ont empoisonné avec tes fruits in-offensifs, mais eux-mêmes, les pauvres aveugles ! Je me croyais malheureux avant, parce que je devais mourir. Maintenant, j’ai tout compris, maître. Je ne désire ni ne crains plus rien. Je me sens bien, calme et heureux, comme si, par une journée très chaude, je venais d’ôter mes vêtements et de me tremper dans l’eau fraîche. Je savais, continua le malade de plus en plus joyeux, je savais que toi seul me comprendrais… Te souviens-tu ? tu me disais jadis que la méditation des éternelles lois mécaniques