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Page:De Merejkowsky - Le Roman de Léonard de Vinci, 1907.djvu/231

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Aujourd’hui, comme s’il répondait à mes doutes, le maître dit :

— La science incomplète donne aux hommes la fierté ; la science parfaite, l’humilité. Ainsi les épis vides dressent vers le ciel leur tête arrogante et les épis pleins l’abaissent vers la terre, leur mère.

— Comment se fait-il alors, maître, répliqua Cesare avec son habituel sourire sacrastique, comment se fait-il alors que la science parfaite que possédait le plus éclairé des séraphins, Lucifer, lui ait inspiré non pas l’humilité, mais l’orgueil pour lequel il fut précipité dans l’abîme ?

Léonard ne répondit pas, mais ayant réfléchi quelques instants, il nous conta une fable :

« Une fois une goutte d’eau désira monter jusqu’au ciel. Aidée par le feu, elle s’élança sous forme de vapeur. Mais ayant atteint une certaine hauteur, elle rencontra l’atmosphère glacée, se resserra, s’appesantit, et sa fierté se changea en terreur. La goutte tomba en pluie. La terre sèche la but et longtemps l’eau enfermée dans sa prison souterraine dut se repentir de son péché. »

Le maître n’ajouta pas un mot, mais j’ai compris le sens de la fable.

Il semble que plus on vit avec lui, moins on le connaît. Aujourd’hui il s’est encore amusé comme un gamin. Et quelles plaisanteries étranges ! J’étais dans