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Page:De Merejkowsky - Le Roman de Léonard de Vinci, 1907.djvu/252

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dans son sourire spirituel et aimable, dans ses yeux clairs, dans les plis rieurs de ses joues rasées de près.

Il sollicita la bénédiction en se pliant en un demi-salut de courtisan, baisa la main maigre du prieur de San Marco et parla latin avec d’élégantes tournures de phrases cicéroniennes, exposant et développant lentement, dignement ses propositions. Il commença par ce que, dans les règles oratoires, on appelle « la recherche de l’attention » ; il loua la gloire du prédicateur florentin, puis attaqua le sujet : le Saint-Père, bien que justement irrité des refus réitérés du frère Savonarole de se présenter à Rome, mais plein de zèle ardent pour le bien de l’Église, pour l’union de tous les catholiques, pour la paix du monde, désirant non la perte mais le salut de son troupeau, avait exprimé l’idée possible, dans le cas où Savonarole se repentirait, de lui rendre ses faveurs.

Le moine leva les yeux et dit :

— Messer, selon votre avis, le Très Saint-Père croit-il en Dieu ?

Ricciardo ne répondit pas, comme s’il n’avait pas entendu la demande indiscrète, et de nouveau reprit son discours, insinuant que la barrette cardinalice pourrait bien coiffer le front de Savonarole, une fois sa soumission faite, et, après s’être incliné vivement vers le moine, dont il touchait du doigt la main, il ajouta avec un sourire captivant :

— Un mot, frère Savonarole, rien qu’un mot ; et la barrette est à vous !