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Page:De Merejkowsky - Le Roman de Léonard de Vinci, 1907.djvu/284

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Sous son aspect très franc, cette missive était pleine d’hypocrisie et de politique. La duchesse cachait à sa sœur ses préoccupations. La paix et la concorde que l’on pouvait supposer d’après la lettre ne régnait pas entre les époux. Béatrice détestait Léonard, non pour son hérésie et son impiété, mais bien parce que, par ordre du duc, il avait peint le portrait de Cecilia Bergamini, sa terrible rivale, la célèbre maîtresse de Ludovic le More. Ces derniers temps, elle soupçonnait encore une autre liaison amoureuse entre son mari et une de ses demoiselles, madonna Lucrezia.

Le duc de Milan atteignait alors l’apogée de la puissance.

Fils de Francesco Sforza, audacieux mercenaire romagnol, moitié soldat, moitié brigand, il rêvait de devenir le souverain maître de l’Italie unifiée.

— Le pape, se vantait le More, est mon confesseur ; l’empereur, mon chef d’armée ; la ville de Venise, mon trésor ; le roi de France, mon courrier.

Il signait Ludovicus Maria Sfortia Anglus, dux Mediolani, en tirant son origine du grand héros, compagnon d’Enée, Anténor le Troyen. Le Colosse, monument élevé à la gloire de son père et érigé par Léonard