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Page:De Merejkowsky - Le Roman de Léonard de Vinci, 1907.djvu/347

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Gama, lorsqu’il fut atteint d’une maladie terrible à cette époque, appelée par les Italiens le mal français et par les Français le mal italien, par les Polonais le mal allemand, par les Moscovites le mal polonais, et par les Turcs le mal chrétien. Vainement il s’était fait soigner par les docteurs de toutes les facultés et attachait les emblèmes en cire de Priape à tous les autels. Brisé par la paralysie, condamné pour l’existence, il gardait une extraordinaire activité cérébrale, et, écoutant les récits des marins, passant des nuits à lire des livres et à consulter des cartes, il faisait des voyages imaginaires et découvrait des terres inconnues.

Un assemblage de boussoles, de compas, de sphères célestes, de sextants, de cadrans, d’astrolabes, rendait sa chambre pareille à une cabine de navire. À travers la fenêtre ouverte sur la loggia, se voyait le crépuscule d’un jour d’avril. Par moments, la lumière de la lampe vacillait sous la brise. Des caves montait le parfum des condiments exotiques : curry, muscade, girofle, cannelle.

— Oui, messer Leonardo, conclut Guido en frottant ses jambes enveloppées, il n’est pas dit pour rien : « La foi transporte les montagnes. » Si Colomb avait douté comme vous, il n’aurait rien fait. Convenez que cela vaut la peine de grisonner à trente ans par suite d’énormes souffrances, pour arriver à découvrir le Paradis Terrestre !

— Le Paradis ? fit Léonard étonné. Qu’entendez-vous par cela. Guido ?