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Page:De Merejkowsky - Le Roman de Léonard de Vinci, 1907.djvu/531

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Machiavel lut les quelques lignes griffonnées d’une écriture enfantine sur du papier gris.

« J’ai entendu dire, écrivait Marietta, que dans les endroits où vous séjournez règnent des fièvres. Vous pouvez vous figurer mon anxiété. Je pense à vous jour et nuit. Le petit, Dieu merci, se porte bien… il commence à vous ressembler étonnamment. Un visage blanc comme la neige et la tête couverte d’épais cheveux noirs, comme chez Votre Excellence. Il me paraît joli parce qu’il vous ressemble. Il est vif et gai comme s’il avait un an déjà. Ne nous oubliez pas, et je vous prie et vous supplie, revenez vite, car je ne puis attendre plus longtemps. Que le Seigneur, la Sainte Vierge et messer Antonio, que je prie pour votre santé, vous protègent ! »

Léonard remarqua que durant la lecture de cette lettre le visage de Machiavel s’éclaira d’un bon et tendre sourire, inattendu sur ses traits durs. Mais de suite ce sourire disparut. Haussant dédaigneusement les épaules, il froissa la lettre, la fourra dans sa poche et murmura bourru :

— Et quel est l’imbécile qui a été parler de ma maladie ?

— Il était impossible de dissimuler, répondit Luccio. Chaque jour monna Marietta se rend chez un de vos amis ou auprès d’un membre du Conseil, demande, questionne où vous êtes, comment vous vous portez…

— Je sais, je sais ! Ne m’en parlez pas !

Il fit un geste impatienté et ajouta :