visiblement fatigué par ses nombreuses nuits d’insomnie, dormait dans une chaire. Parfois la porte s’ouvrait, le secrétaire Agapito, avec une expression préoccupée, des lunettes sur le nez, la plume derrière l’oreille, passait la tête et faisait signe à l’un des assistants.
À chacune de ces apparitions l’ambassadeur de Rimini frissonnait douloureusement, se levait, mais voyant que ce n’était pas encore son tour, soupirait longuement et de nouveau se laissait aller au sommeil, bercé par le bruit régulier du pilon dans le mortier de cuivre.
Par suite du manque de pièces dans le vieux monument, la chapelle avait été transformée en pharmacie de campagne. Devant la fenêtre, à l’emplacement de l’autel, sur une table encombrée de fioles et de pots, l’évêque de Santa Justa, Gaspare Torella, médecin principal de Sa Sainteté le pape et de César, préparait le médicament à la mode, une infusion de « bois sacré », le gaïac, que l’on expédiait d’Amérique. Pétrissant dans ses jolies mains le cœur jaune odorant de la plante, qui formait des boules grasses, l’évêque docteur expliquait avec un sourire aimable la nature et les qualités de ce bois.
Et sur les murs les apôtres sculptés dans les lambris paraissaient étonnés de l’étrange conversation des nouveaux pasteurs de l’Église. Dans cette chapelle éclairée par la lueur blafarde d’une lampe officinale, dans l’atmosphère imprégnée de camphre et d’encens, les prélats romains réunis semblaient officier une messe mystérieuse.