Page:De Musset - Voyage en Italie et en Sicile, 1866.djvu/156

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ces soldats syracusains qui rendirent la liberté à des prisonniers athéniens en leur entendant réciter des scènes d’une pièce nouvelle d’Euripide. Le profil, bien trop connu, des médailles de Syracuse se rencontre, à chaque pas, sur les épaules des femmes du peuple. Les jeunes filles, en allant deux par deux chercher l’eau, s’appuient l’une sur l’autre et portent des vases sur leur tête avec une grâce qu’elles n’ont pourtant pas étudiée sur les bas-reliefs antiques. Les laveuses de la fontaine Aréthuse, presque entièrement nues, sont défendues par cette pudeur et cette dignité qui vous obligent à regarder chastement la Diane et la Vénus de Milo. Il faut avouer que les hommes sont moins beaux que les femmes, à Syracuse ; mais, toujours, la nature a fait des nez écrasés. Nous savons, par Socrate, que tout le monde, à Athènes, n’était pas favorisé de la mine d’Alcibiade ; Philopoemen, le dernier héros de la Grèce, avait les jambes beaucoup trop longues, comme l’a dit Plutarque, et les historiens n’ont pas mis en note tous les gros ventres et les dos voûtés qui se promenaient sous les portiques.

Selon Strabon, Syracuse renfermait, jadis, deux millions d’habitants et sa circonférence était plus grande que ne l’est, aujourd’hui, celle de Londres. La ville moderne se compose seulement du quartier appelé autrefois Ortigia. Elle contient dix-huit mille habitants, c’est-à-dire la centième partie de la population du temps de Hiéron.

Les ruines sont hors des portes. Un aqueduc fonctionne encore. On voit les carrières où Philoxène aimait mieux retourner que d’applaudir les vers du tyran. La plus curieuse, celle qui fait l’admiration