Les ultramontains dissimulent volontiers, mais fort mal ; on voit, sur le bout de leur nez, la pensée qu’ils s’imaginent cacher. Il y a une grande différence entre le mensonge maladroit et indiscret et cette dissimulation froide qui contient son idée, la suit avec constance et va, quelquefois, jusqu’à la mort sans se trahir. Peut-être, si Modena était de Venise ou de Palerme, qui fournissent encore des caractères en-dedans, aurait-il pu donner au rôle de Louis XI une couleur originale, sans s’attacher à l’exactitude historique ; mais il est certain qu’une tragédie sur Charles le Téméraire lui eût mieux convenu.
Cependant, Modena fit peu de contre-sens dans le rôle de Louis XI. Les terreurs, les superstitions, les prières au vieux moine pour obtenir du ciel quelques années de répit, les angoisses de la mort, furent rendues avec beaucoup de bonheur et de talent. Le reste fut manqué, empreint d’une exagération opposée au caractère du personnage. Toutes les fois que se présentait le sentier épineux qui traverse entre le tragique et le comique, l’acteur chancelait et tombait d’un côté ou de l’autre, sans pouvoir reprendre le milieu du chemin. On riait, le plus souvent, où il aurait fallu frémir. Quant aux grimaces et tics nerveux destinés à montrer les progrès de la maladie, c’étaient des contorsions dont le public du Nord se serait irrité. Le costume laissait aussi à désirer. Un Français reconnaît difficilement Louis XI en robe vert-pomme bordée d’hermine, avec un bonnet de soie vert et blanc ; sans imposer aux acteurs l’obligation puérile de porter, sur leurs habits, les couleurs qui sont dans l’âme du personnage, on se figurerait avec peine un Louis XI bigarré, un Philippe II chatoyant