Page:De Pitray - Voyages abracadabrants du gros Philéas, 1890.djvu/198

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Il fut heureux pour Philéas que l’excès de la terreur l’eut rendu agile, au lieu de le paralyser, car il était à peine sur l’arbre lorsque les loups arrivèrent. Ils se jetèrent avec la frénésie de la faim sur les chevaux ; malgré les ruades désespérées de ces pauvres bêtes, ils eurent bientôt mis en pièces l’attelage de Philéas. Du haut de son arbre Saindoux, les cheveux dressés sur la tête, les regardait faire tandis que le négrillon, au comble de l’épouvante, poussait des cris aigus et se cramponnait aux jambes de son maître.

— Tais-toi, Sagababa ! disait Philéas d’une voix entrecoupée ; ça ne sert à rien… de crier… D’ailleurs, les loups vont s’en aller maintenant qu’il n’y a plus rien à manger.

— Et nous ? gémit Sagababa en claquant des dents.

Philéas bondit.

— Tu crois qu’ils voudraient aussi nous manger ? s’écria-t-il. Eh bien, merci ! nous serions dans de beaux draps… Et Polyphème qui ne sait pas où nous sommes… Pristi ! quelle position… et mon fusil qui est dans le traîneau !… j’aime mieux les lions… Tiens ! j’ai une idée… Ta carnassière, Sagababa, vite ! bien… Nous allons utiliser mon essai de piqûre empoisonnée ; c’est le moment, pour sûr. Ton couteau, à présent ; à merveille ! Coupe-moi une bonne gaule. C’est cela. Tiens-la afin que j’y attache le couteau. Fais tremper le bout de la lame dans cette petite bouteille… C’est ça. Gredins ! vous ne vous doutez pas de ce que je vous prépare…

Tenant à deux mains son arme bizarre, Saindoux attendit le moment où la masse hurlante des loups