Page:De Pitray - Voyages abracadabrants du gros Philéas, 1890.djvu/260

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je vais chez lui… mais il ne faut pas qu’il s’en doute, entends-tu ?

Sagababa fit un signe affirmatif et Polyphème entra chez Saindoux. Il alla droit au revolver, le désarma et en remplaça les cartouches par d’autres, qui n’étaient chargées qu’à poudre.

Rassuré après cela, il regagna sa chambre, s’y arma et y attendit les événements, avec un mélange d’impatience et de curiosité.

Quand minuit sonna, il entendit Philéas se lever, aller avec précaution à la porte, l’ouvrir et se diriger vers la charrette du Bordelais…

Le silence était profond ; le temps, calme et relativement doux. Philéas était pourtant fort mal à l’aise et tremblait légèrement.

— Bah ! se disait-il, tout en allant avec précaution vers la charrette ; je ne vois pas quel mal je fais, après tout. D’après ce que m’a dit Sagababa, cet homme s’est absenté pour la nuit. Je lui tue son ours, je l’apaise… (l’homme, pas l’ours), je lui donne six cents francs en lui déclarant que l’ours était méchant comme la gale, et voulait nous dévorer tous. Il sera enchanté… (l’homme, pas l’ours), et j’aurai ma graisse ! C’est parfait ; m’y voilà ! ai-je mon revolver ? bien. Et mon couteau ? bien. Peste ! s’il allait se rebiffer comme tantôt… Il est encore dans son coin, le bon animal ! Il n’a pas bougé depuis tantôt… Visons à l’oreille !

Grâce à la sage précaution de Polyphème, les deux coups de feu de Philéas étaient inoffensifs. En revanche, ils étaient bruyants, car la charge de poudre avait été mesurée par une main libérale. En