Page:De Sales - Introduction à la vie dévote, Curet, 1810.djvu/50

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comme il arriva à la femme de Loth, qui tourna la tête vers Sodome. Ils s’abstiennent du péché comme les malades font des melons ; vous le savez, ils n’en mangent pas, parce qu’ils craignent la mort dont le Médecin les menace ; mais ils s’inquiètent de cette abstinence ; ils en parlent avec chagrin, et doutent de ce qu’ils ont à faire, du moins ils veulent en sentir souvent l’odeur, et ils estiment heureux ceux qui peuvent en manger. Voilà le caractère de ces foibles et lâches pénitens ; ils s’abstiennent pour quelque temps du péché, mais c’est à regret ; ils voudroient bien pouvoir pécher sans être damnés ; ils parlent du péché avec je ne sais quel goût qui en fait sentir le faux plaisir, et ils veulent toujours croire que les autres y trouvent de quoi se satisfaire. Un homme quitte dans la confession le dessein qu’il avoit de se venger ; mais aussitôt après on le trouvera dans une conversation libre de ses amis avec qui il prendra plaisir de parler de sa querelle ; il dira, que sans la crainte de Dieu, il auroit fait ceci et cela, que la Loi divine, sur cet article du pardon, est bien difficile ; que plût à Dieu qu’il fût permis de se venger. Ah ! que ce pauvre homme, tout hors de péché qu’il est, a le cœur embarrassé de l’affection au péché, et qu’il est semblable aux Israélites dont j’ai parlé ! Il faut dire la même chose de cette femme, qui ayant détesté ses