Page:De Scudery - Alaric, ou Rome vaincue, 1654.djvu/112

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Et que de mille dards, son triste cœur percé,
Cria vengeance au ciel, par tout son sang versé.
O fascheux souvenir, qui nous couvre de honte !
Si le crime fut prompt, la vengeance fut prompte :
Et nous sentismes bien, que les dieux irritez,
Ont en horreur le meurtre, et les impietez.
A quelque temps de là, l’impitoyable peste,
D’un invisible traict, donna le coup funeste :
Et d’un venin subtil, empoisonnant tout l’air,
La mort vola par tout, plus viste qu’un esclair.
Un esprit tout de feu, serpente dans les veines ;
Une noire vapeur, de cent chimeres vaines,
Offusque le cerveau ; vient troubler la raison ;
Et fait qu’un si grand mal, n’a point de guerison.
Ce mal se communique, et tout l’air qu’on respire,
Bien loin de l’apaiser, le redouble et l’empire :
Les hommes seulement n’en sont pas attaquez,
Les oyseaux en volant, en tombent suffoquez ;
Et tous les animaux, ont la mesme avanture,
Par l’horrible poison, qui destruit la nature.
On fuit pour l’esviter, mais on fuit vainement :
L’amy quitte l’amy, mais inutilement :
La terre pour les corps, en tous lieux est ouverte,
Et chacun porte en soy, la cause de sa perte.
Le fils servant le pere, en est assassiné ;
Le pere aydant le fils, voit son sort terminé ;
A l’enfant par la mere, est la clarté ravie ;
Elle cause sa mort, ayant causé sa vie ;