Page:De Scudery - Alaric, ou Rome vaincue, 1654.djvu/356

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au corps-de-garde, et le tirant à part,
En ces mots à peu près, l’entretient à l’escart.
Vous que l’amour anime aussi bien que la gloire ;
Vous, vous qui prétendez à plus d’une victoire ;
Vous amant et guerrier, voicy l’occasion
D’assouvir vostre flâme, et votre ambition.
J’ay veu du haut des murs les troupes ennemies,
Dans un profond sommeil laschement endormies :
Comme si les Romains, à vaincre accoustumez,
Avoient peur seulement de leurs feux allumez.
Usez bien des moyens que le destin vous donne :
Ornez-vous cette nuit de plus d’une couronne :
Faites une sortie, et d’un heur sans esgal,
Triomphez d’Alaric, et de vostre rival.
L’un et l’autre endormy, facilitent la chose :
Valere veillez donc, quand Tiburse repose :
Par un noble travail secondez ce repos,
Et deffaites ensemble, et Tiburse, et les Goths.
Valere à ce discours sent redoubler sa peine,
Piqué d’ambition, et d’amour, et de haine :
Et suivant le conseil de ce trompeur amy,
Il resveille à l’instant le soldat endormy :
Et redoublant son cœur par sa valeur extrême,
Le fait armer sans bruit, comme il s’arme luy-mesme ;
Se prépare à sortir, suivy de ces soldats ;
Fait ouvrir, sort, et marche aux nocturnes combats.
Rigilde d’autre part, que la fureur transporte,
Va trouver son rival qui garde une autre porte,