Page:De Smet - Lettres choisies,1875.djvu/391

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sait sait de loger, il s’aperçut que ses mains étaient gelées, en sorte que, pour n’en pas perdre l’usage, il lui fallut les baigner dans une eau glacée. Il négligeait son sommeil  ; il oubliait ses repas  ; il était prêt à s’imposer tous les sacrifices, dans l’intérêt de ses chers sauvages. Au milieu de tant de travaux et de fatigues, il jouissait d’une humeur toujours égale, avait le front serein, était patient et non moins également aimable. Ni les difficultés pécuniaires, ni les embarras de toute espèce, qui lui survenaient à chaque instant, ne pouvaient troubler la paix de son âme. La pratique de l’humilité lui était, pour ainsi dire, naturelle : jamais rien de prétentieux, rien d’affecté ne se remarqua dans son air  ; jamais une parole qui, même de loin, sentît la vanité. Il ignorait complètement ces allusions raffinées par où l’amour-propre cherche quelquefois à donner de l’importance à la personnalité. Quoique supérieur et hautement estimé de toux ceux qui savent apprécier les bonnes manières, son grand plaisir était de s’appliquer, comme le dernier des domestiques, aux ouvrages les plus vils. Il était tellement mort à tout ce qui s’appelle orgueil de la vie, qu’il n’opposa jamais qu’un visage imperturbable aux reproches amers, aux insolents outrages qu’il recevait quelquefois des gens de peu d’éducation. Bien souvent, à la première occasion, il se vengeait des inconvenances qu’on se serait permises envers lui, en rendant un service à la personne qui l’avait offensé. Quand on lui reprochait