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LA LITTÉRATURE ET LES ARTS

texture et le développement de la pièce en allemand, comme en français, exige un style simple, dans lequel on ne sente que la pureté du langage et rarement sa magnificence. Nous voulons en France qu’on fasse effet, non-seulement à chaque scène, mais à chaque vers ; et cela est inconciliable avec la vérité. Rien n’est si aisé que de composer ce qu’on appelle des vers brillants ; il y a des moules tout faits pour cela ; ce qui est difficile, c’est de subordonner chaque détail à l’ensemble et de retrouver chaque partie dans le tout, comme le reflet du tout dans chaque partie. La vivacité française a donné à la marche des pièces de théâtre un mouvement rapide très-agréable ; mais elle nuit à la beauté de l’art quand elle exige des succès instantanés aux dépens de l’impression générale.

À côté de cette impatience qui ne tolère aucun retard, il y a une patience singulière pour tout ce que la convenance exige ; et quand un ennui quelconque est dans l’étiquette des arts, ces mêmes Français qu’irritoit la moindre lenteur, supportent tout ce qu’on veut par respect pour l’usage. Par exemple, les expositions en récit sont indispensables dans les tragédies fran-