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DE L’ALLEMAGNE

la plus exacte dans les rapports de la vie sociale ; ce n’est pas servilité, c’est régularité chez eux que l’obéissance ; ils sont scrupuleux-dans l’accomplissement des ordres qu’ils reçoivent, comme si tout ordre étoit un devoir.

Les hommes éclairés de l’Allemagne se disputent avec vivacité le domaine des spéculations, et ne souffrent dans ce genre aucune entrave ; mais ils abandonnent assez volontiers aux puissants de la terre tout le réel de la vie. « Ce réel, si dédaigné par eux, trouve pourtant des acquéreurs qui portent ensuite le trouble et la gêne dans l’empire de l’imagination.[1] » L’esprit des Allemands et leur caractère paroissent n’avoir aucune communication ensemble : l’un ne peut souffrir de bornes, l’autre se soumet à tous les jougs ; l’un est très-entreprenante l’autre très-timide ; enfin les lumières de l’un donnent rarement de la force à l’autre, et cela s’explique facilement. L’étendue des connoissances dans les temps modernes ne fait qu’affoiblir le caractère, quand il n’est pas fortifié par l’habitude des affaires et l’exercice de la volonté. Tout voir et tout comprendre est une grande raison d’incertitude ; et

  1. Phrase supprimée par les censeurs.