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LA CHEVALERIE

heur des femmes soit plus en danger que celui où tout dépend de ce qu’on appelle l’opinion, et où chacun apprend des autres ce qu’il est de bon goût de sentir.

Il faut l’avouer, les femmes ont fini par prendre part à l’immoralité qui détruisoit leur véritable empire : en valant moins, elles ont moins souffert. Cependant, à quelques exceptions près, la vertu des femmes dépend toujours de la conduite des hommes. La prétendue légèreté des femmes vient de ce qu’elles ont peur d’être abandonnées : elles se précipitent dans la honte par crainte de l’outrage.

L’amour est une passion beaucoup plus sérieuse en Allemagne qu’en France. La poésie, les beaux-arts, la philosophie même, et la religion, ont fait de ce sentiment un culte terrestre qui répand un noble charme sur la vie. Il n’y a point eu dans ce pays, comme en France, des écrits licencieux qui circuloient dans toutes les classes, et détruisoient le sentiment chez les gens du monde, et la moralité chez les gens du peuple. Les Allemands ont cependant, il faut en convenir, plus d’imagination que de sensibilité ; et leur loyauté seule répond de leur constance. Les Français, en général, respectent les