Page:De Staël – De l’Allemagne, Tome 2, 1814.djvu/120

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
102
LA LITTÉRATURE ET LES ARTS

cause est blanc aussi comme le lis, et la Vierge pure est son chaste symbole.

LE DUC DE BOURGOGNE.

Les mots trompeurs du mensonge sont pleins d’artifices. Mais le langage de cette femme est simple comme celui d’un enfant, et si le mauvais génie l’inspire il sait lui souffler les paroles de l’innocence : non, je ne veux plus l’entendre. Aux armes, je me défendrai mieux en la combattant qu’en l’écoutant.

JEANNE.

Tu m accuses de magie : tu crois voir en moi les artifices de l’enfer ! fonder la paix, réconcilier les haines, est-ce donc là l’œuvre de l’enfer ? La concorde viendroit-elle du séjour des damnés ? Qu’y a-t-il d’innocent, de sacré, d’humainement bon, si ce n’est de se dévouer pour sa patrie ? Depuis quand la nature est-elle si fort en combat avec elle-même, que le ciel abandonne la bonne cause et que le démon la défende ? Si ce que je te dis est vrai, dans quelle source l’ai-je puisé ? Qui fut la compagne de ma vie pastorale, qui donc instruisit la simple fille d’un berger dans les choses royales ? Jamais je ne m’étois présentée devant les souverains, l’art de la parole m’est