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DES PHILOSOPHES ALLEMANDS.

y faire servir, on répand sur toutes choses l’obscurité qui précéda la création, mais non la lumière qui l’a suivie. Les expressions scientifiques prodiguées sur un sujet auquel tout le monde croit avoir des droits révoltent l’amour-propre. Ces écrits si difficiles à comprendre prêtent, quelque sérieux qu’on soit, à la plaisanterie, car il y a toujours des méprises dans les ténèbres. L’on se plaît à réduire à quelques assertions principales et faciles à combattre cette foule de nuances et de restrictions qui paroissent toutes sacrées à l’auteur, mais que bientôt les profanes oublient ou confondent.

Les Orientaux ont été de tout temps idéalistes, et l’Asie ne ressemble en rien au midi de l’Europe. L’excès de la chaleur porte dans l’orient à la contemplation, comme l’excès du froid dans le nord. Les systèmes religieux de l’Inde sont très-mélancoliques et très-spiritualistes, tandis que les peuples du midi de l’Europe ont toujours eu du penchant pour un paganisme assez matériel. Les savants Anglais qui ont voyagé dans l’Inde ont fait de profondes recherches sur l’Asie ; et des Allemands, qui n’avoient pas, comme les princes de la mer, les occasions, de s’instruire par leurs propres yeux, sont arri-