Page:De Staël – De l’Allemagne, Tome 3, 1814.djvu/158

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
140
LA PHILOSOPHIE ET LA MORALE.

temps passés. En Allemagne, l’étude de l’antiquité, comme celle des sciences et de la philosophie, réunit les branches divisées de l’esprit humain.

Heyne embrasse tout ce qui se rapporte à la littérature, à l’histoire et aux beaux-arts avec une étonnante perspicacité. Wolf tire des observations les plus fines les indications les plus hardies, et ne se soumettant en rien à l’autorité, il juge par lui-même l’authenticité des écrits des Grecs et leur valeur. On peut voir dans un dernier écrit de M. Ch. de Villers, que j’ai déjà nommé avec la haute estime qu’il mérite, quels travaux immenses l’on publie chaque année en Allemagne sur les auteurs classiques. Les Allemands se croient appelés en toutes choses au rôle de contemplateurs, et l’on diroit qu’ils ne sont pas de leur siècle, tant leurs réflexions et leur intérêt se tournent vers une autre époque du monde.

Il se peut que le meilleur temps pour la poésie fût celui de l’ignorance, et que la jeunesse du genre humain soit passée pour toujours : cependant on croit sentir dans les écrits des Allemands une jeunesse nouvelle, celle qui naît du noble choix qu’on peut faire après avoir tout connu.