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INFLUENCE DE LA NOUVELLE PHILOSOPHIE.

le Jupiter du sculpteur ressembleroit au Jupiter du poète ; pourquoi donc l’intelligence suprême, qui a formé la nature et l’âme, n’auroit-elle pas fait de l’une l’emblème de l’autre ? Ce n’est point un vain jeu de l’imagination que ces métaphores continuelles, qui servent à comparer nos sentiments avec les phénomènes extérieurs, la tristesse, avec le ciel couvert de nuages, le calme, avec les rayons argentés de la lune, la colère, avec les flots agités par les vents ; c’est la même pensée du créateur qui se traduit dans les deux langages différents, et l’un peut servir d’interprète à l’autre. Presque tous les axiomes de physique correspondent à des maximes de morale. Cette espèce de marche parallèle qu’on aperçoit entre le monde et l’intelligence est l’indice d’un grand mystère, et tous les esprits en seroient frappés, si l’oit parvenait à en tirer des découvertes positives ; mais toutefois cette lueur encore incertaine porte bien loin les regards.

Les analogies des divers éléments de la nature physique entre eux servent à constater la suprême loi de la création, la variété dans l’unité, et l’unité dans la variété. Qu’y a-t-il de plus étonnant, par exemple, que le rapport des sons et des formes, des sons et des couleurs ?