Page:De Staël – De l’Allemagne, Tome 3, 1814.djvu/252

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
234
LA PHILOSOPHIE ET LA MORALE.

est si souvent profanée ? J’oserai le dire, c’est à l’inégalité singulière que l’opinion de la société met entre les devoirs des deux époux qu’il faut s’en prendre. Le christianisme a tiré les femmes d’un état qui ressembloit à l’esclavage. L’égalité devant Dieu étant la base de cette admirable religion, elle tend à maintenir l’égalité des droits sur la terre ; la justice divine, la seule parfaite, n’admet aucun genre de priviléges, et celui de la force moins qu’aucun autre. Cependant il est resté de l’esclavage des femmes des préjugés qui, se combinant avec la grande liberté que la société leur laisse, ont amené beaucoup de maux.

On a raison d’exclure les femmes des affaires politiques et civiles ; rien n’est plus opposé à leur vocation naturelle que tout ce qui leur donneroit des rapports de rivalité avec les hommes, et la gloire elle-même ne sauroit être pour une femme qu’un deuil éclatant du bonheur. Mais si la destinée des femmes doit consister dans un acte continuel de dévouement à l’amour conjugal, la récompense de ce dévouement, c’est la scrupuleuse fidélité de celui qui en est l’objet.

La religion ne fait aucune différence entre les devoirs des deux époux, mais le monde en établit