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CONSIDÉRATIONS GÉNÉRALES, etc.

Un homme dont j’ai déjà eu l’occasion de parler, M. Ancillon, vient de faire paroitre un ouvrage sur la nouvelle philosophie de l’Allemagne, qui réunit la lucidité de l’esprit français à la profondeur du génie allemand. M. Ancillon s est déjà acquis un nom célèbre comme historien ; il est incontestablement ce qu’on a coutume d’appeler en France une bonne tête ; son esprit même est positif et méthodique, et c’est par son âme qu’il a saisi tout ce que la pensée de l’infini peut présenter de plus vaste et de plus élevé. Ce qu’il a écrit sur ce sujet porte un caractère tout-à-fait original ; c’est pour ainsi dire le sublime mis à la portée de la logique : il trace avec précision la ligne où les connoissances expérimentales s’arrêtent, soit dans les arts, soit dans la philosophie, soit dans la religion ; il montre que le sentiment va beaucoup plus loin que les connoissances, et que par-delà les preuves démonstratives il y a l’évidence naturelle ; par-delà l’analyse, l’inspiration ; par-delà les mots, les idées ; par-delà les idées, les émotions, et que le sentiment de l’infini est un fait de l’àme, un fait primitif, sans lequel il n’y auroit rien dans l’homme que de l’instinct physique et du calcul.

Il est difficile d’être religieux à la manière in-