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LA PHILOSOPHIE ET LA MORALE.

centre et mobile de nos sentiments et de nos idées. Sans doute l’incomplet du langage nous oblige à nous servir d’expressions erronées, il faut répéter suivant l’usage, tel individu a de la raison, ou de l’imagination, ou de la sensibilité, etc. ; mais si l’on vouloit s’entendre par un mot, on devroit dire seulement[1] : Il a de l’âme, il a beaucoup d’âme. C’est ce souffle divin qui fait tout l’homme.

Aimer en apprend plus sur ce qui tient aux mystères de l’âme que la métaphysique la plus subtile. On ne s’attache jamais à telle ou telle qualité de la personne qu’on préfère, et tous les madrigaux disent un grand mot philosophique en répétant que c’est pour je ne sais quoi qu’on aime, car ce je ne sais quoi c’est l’ensemble et l’harmonie que nous reconnoissons par l’amour, par l’admiration, par tous les sentiments qui nous révèlent ce qu’il y a de plus profond et de plus intime dans le cœur d’un autre.

L’analyse, ne pouvant examiner qu’en divisant, s’applique, comme le scalpel, à la nature morte ;

  1. M. Ancillon, dont j’aurai l’occasion de parler dans la suite de cet ouvrage, s’est servi de cette expression dans : un livre qu’on ne sauroit se lasser de méditer.