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LA PHIOLOSOPHIE ET LA MORALE

lui conviennent ; mais, grâce à Dieu, et cette expression est ici bien placée, grâce à Dieu, dis-je, ce système est tout-à-fait faux dans son principe, et le parti qu’en ont tiré ceux qui soutenoient la cause de l’immortalité est une preuve de plus des erreurs qu’il renferme.

Si la plupart des hommes corrompus se sont appuyée sur la philosophie matérialiste, lorsqu’ils ont voulu s’avilir méthodiquement et mettre leurs actions en théorie, c’est qu’ils croyoient, en soumettant l’âme aux sensations, se délivrer ainsi de la responsabilité de leur conduite. Un être vertueux, convaincu de ce système, en seroit profondément affligé, car il craindroit sans cesse que l’influence toute-puissante des objets extérieurs n’altérât la pureté de son âme et la force de ses résolutions. Mais quand on voit des hommes se réjouir en proclamant qu’ils sont en tout l’œuvre des circonstances, et que ces circonstances sont combinées par le hasard, on frémit au fond du cœur de leur satisfaction perverse.

Lorsque les sauvages mettent le feu à des cabanes, l’on dit qu’ils se chauffent avec plaisir à l’incendie qu’ils ont allumé : ils exercent alors du moins une sorte de supériorité sur le désordre dont ils sont coupables, ils font servir la des-