Page:De Staël – La Révolution française, Tome I.djvu/349

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
335
SUR LA RÉVOLUTION FRANÇOISE

clamations à cette prière, qui devoit en effet les émouvoir jusqu’au fond de l’âme ; mais il n’en falloit pas davantage pour exciter les soupçons de cette foule d’hommes exaltés par les nouvelles perspectives que leur offroit la situation des affaires. L’on répétoit à Paris, dans toutes les classes, que le roi vouloit partir, qu’il vouloit essayer une seconde fois de dissoudre l’assemblée ; et le monarque se trouva dans la plus périlleuse des situations. Il avoit excité l’inquiétude comme s’il eût été fort, et néanmoins tous les moyens de se défendre lui manquaient.

Le bruit se répandit que deux cent mille hommes se préparoient à marcher sur Versailles, pour amener à Paris le roi et l’assemblée nationale. Ils sont entourés, disait-on, des ennemis de la chose publique ; il faut les conduire au milieu des bons patriotes. Dès qu’on a trouvé, dans des temps de troubles, une phrase un peu spécieuse, les hommes de parti, et surtout les François, trouvent un plaisir singulier à la répéter ; les argumens qu’on pourroit y opposer sont sans pouvoir sur leur esprit ; car ce qu’il leur faut, c’est de penser et de parler comme les autres, afin d’être certains d’en être applaudis. J’appris, le matin du 5 octobre, que le peu-