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CONSIDÉRATIONS

ple marchoit sur Versailles ; mon père et ma mère y étoient établis. Je partis à l’instant pour aller les rejoindre, et je passai par une route peu fréquentée, sur laquelle je ne rencontrai personne. Seulement, en approchant de Versailles, je vis les piqueurs qui avoient accompagné le roi à la chasse, et je sus, en arrivant, qu’on lui avoit envoyé un exprès pour le supplier de revenir. Singulier pouvoir des habitudes dans la vie des cours ! le roi faisoit les mêmes choses, de la même manière et à la même heure que dans les temps les plus calmes ; la tranquillité d’âme que cela suppose lui a mérité l’admiration, quand les circonstances ne lui ont plus permis que les vertus des victimes. M. Necker monta très-vite au château, pour se rendre au conseil ; et ma mère, toujours plus effrayée par les nouvelles menaçantes qu’on apportoit de Paris, se rendit dans la salle qui précédoit celle où se tenoit le roi, afin de partager le sort de mon père, quoi qu’il arrivât. Je la suivis, et je trouvai cette salle remplie d’un grand nombre de personnes, attirées là par des sentimens bien divers.

Nous vîmes passer Mounier, qui venait, fort à contre-cœur, exiger, comme président de l’assemblée constituante, la sanction royale pure