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SUR LA RÉVOLUTION FRANÇOISE

et simple à la déclaration des droits. Le roi en avoit, pour ainsi dire, littéralement admis les maximes ; mais il attendoit, avoit il dit, leur application pour y apposer son consentement. L’assemblée s’étoit révoltée contre ce léger obstacle à ses volontés ; car il n’y a rien de si violent en France que la colère qu’on a contre ceux qui s’avisent de résister sans être les plus forts.

Chacun se demandoit dans la salle où nous étions réunis, si le roi partiroit ou non. On apprit d’abord qu’il avoit commandé ses voitures, et que le peuple de Versailles les avoit dételées ; ensuite qu’il avoit ordonné au régiment de Flandre, alors en garnison à Versailles de prendre les armes, et que ce régiment s’y étoit refusé. Nous avons su depuis qu’on avoit délibéré dans le conseil, si le roi se retireroit dans une province ; mais, comme le trésor royal manquoit d’argent, que la disette de blés étoit telle qu’on ne pouvoit faire aucun rassemblement de troupes, et que l’on n’avoit rien préparé pour s’assurer des régimens dont on croyoit encore pouvoir disposer, le roi craignoit de s’exposer à tout en s’éloignant ; il étoit d’ailleurs convaincu que, s’il partoit, l’assemblée donneroit la couronne au duc d’Orléans. Mais l’assemblée n’y songeoit pas, même