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SUR LA RÉVOLUTION FRANÇOISE

riter. La garde nationale marchoit avec ordre, obéissoit à son chef, et n’exprimoit que le désir de ramener à Paris le roi et l’assemblée. Enfin M. de la Fayette entra dans le château, et traversa la salle où nous étions, pour se rendre chez le roi. Chacun l’entouroit avec ardeur, comme s’il eût été le maître des événements, et déjà le parti populaire étoit plus fort que son chef ; les principes cédoient aux factions, ou plutôt ne leur servoient plus que de prétexte.

M. de la Fayette avoit l’air très-calme ; personne ne l’a jamais vu autrement ; mais sa délicatesse souffroit de l’importance de son rôle ; il demanda les postes intérieurs du château, pour en garantir la sûreté. On se contenta de lui accorder ceux du dehors. Ce refus étoit simple, puisque les gardes du corps ne devoient point être déplacés ; mais le plus grand des malheurs faillit en résulter. M. de la Fayette sortit de chez le roi en nous rassurant tous ; chacun se retira chez soi après minuit ; il sembloit que c’étoit bien assez de la crise de la journée, et l’on se crut en parfaite sécurité, comme il arrive presque toujours quand on a long-temps éprouvé une grande crainte, et qu’elle ne s’est pas réalisée. M. de la Fayette, à cinq heures du matin, pensa que tous les dangers