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SUR LA RÉVOLUTION FRANÇOISE

il seroit fort à désirer que les titres, tels qu’ils existaient, n’eussent été supprimés qu’en étant remplacés par la pairie et par les distinctions qui émanent d’elle. Un grand publiciste anglais a dit, avec raison, que toutes les fois qu’il existe dans un pays un principe de vie quelconque, le législateur doit en tirer parti. En effet, comme rien n’est si difficile que de créer, il faut le plus souvent greffer une institution sur une autre.

L’assemblée constituante traitoit la France comme une colonie dans laquelle il n’y auroit point eu de passé ; mais, quand il y en a un, on ne peut empêcher qu’il n’ait son influence. La nation françoise étoit fatiguée de la noblesse de second ordre ; mais elle avait, mais elle aura toujours du respect pour les noms historiques. C’étoit de ce sentiment qu’il falloit se servir pour établir une chambre haute, et tâcher de faire tomber, par degrés, en désuétude, toutes ces dénominations de comtes et de marquis qui, lorsqu’elles ne s’attachent ni à des souvenirs ni à des fonctions politiques, ressemblent plutôt à des sobriquets qu’à des titres.

L’une des plus singulières propositions de ce jour fut celle de renoncer aux noms des terres que plusieurs familles portoient depuis