Page:De Staël – La Révolution française, Tome I.djvu/138

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

parlemens déclarèrent qu’ils n’avoient pas le droit d’enregistrer les impôts, droit dont ils avoient cependant usé depuis deux siècles ; et, par ambition, c’est-à-dire, pour se mettre à la tête du mouvement des esprits, ils abdiquèrent en faveur de la nation un pouvoir qu’ils avoient défendu avec opiniâtreté contre le trône. Dès ce moment, la révolution fut faite, car il n’y eut plus qu’un vœu dans tous les partis, celui d’obtenir la convocation des états généraux.

Les mêmes magistrats qui, plus tard, ont qualifié de rebelles les amis de la liberté, demandèrent cette convocation avec tant de véhémence, que le roi se crut obligé d’envoyer saisir au milieu d’eux, par ses gardes-du-corps, deux de leurs membres, MM. D’Espréménil et de Monsabert. Plusieurs des nobles, devenus depuis les ennemis ardens de la monarchie limitée, allumèrent alors le feu qui produisit l’explosion. Douze gentilshommes bretons furent envoyés à la Bastille, et le même esprit d’opposition qu’on punissoit en eux animoit le reste de la noblesse de Bretagne. Le clergé lui-même demanda les états généraux. Aucune révolution, dans un grand pays, ne peut réussir que quand elle