Page:De Staël – La Révolution française, Tome I.djvu/237

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coup moins au parti populaire, quand il étoit devenu plus puissant encore, dans l’espace de temps que la cour avoit perdu en incertitudes ?

L’à-propos est la nymphe Égérie des hommes d’État, des généraux, de tous ceux qui ont affaire à la mobile nature de l’espèce humaine. Un coup d’autorité contre le tiers état n’étoit pas possible le 23 juin 1789, et c’étoit plutôt aux nobles que le roi devoit commander : car le point d’honneur des nobles peut consister dans l’obéissance ; c’est un des statuts de l’ancienne chevalerie que de se soumettre aux rois comme à des chefs militaires ; mais l’obéissance implicite du peuple n’est que de la sujétion ; et l’esprit du siècle n’y portoit plus. Le trône ne peut être solidement appuyé, de nos jours, que sur le pouvoir de la loi.

Le roi ne devoit pas sacrifier la popularité qu’il avoit acquise en accordant le doublement du tiers : elle valoit mieux pour lui que toutes les promesses de ses courtisans. Mais il la perdit par sa déclaration du 23 juin ; et, quoique cette déclaration contînt de très-bonnes choses, elle manqua totalement son effet. Les premières paroles révoltèrent le tiers état, et dès