milieu de l’Europe, et avec une caste de privilégiés dont il falloit apaiser les prétentions, un tel projet étoit impraticable ; et, d’ailleurs, comment concilier les institutions d’une république avec l’existence d’une monarchie ? La constitution anglaise offroit le seul exemple de ce problème résolu. Mais une manie de vanité presque littéraire inspiroit aux François le besoin d’innover à cet égard. Ils craignaient, comme un auteur, d’emprunter les caractères ou les situations d’un ouvrage déjà existant. Or, en fait de fictions, on a raison d’être original ; mais quand il s’agit d’institutions réelles, l’on est trop heureux que l’expérience les ait garanties. Certes, j’aurais honte, dans ce temps-ci plus que dans tout autre, de me mêler aux déclamations contre la première assemblée représentative de France : elle renfermoit des hommes du plus rare mérite, et c’est à la réforme opérée par elle que la nation est redevable encore des richesses de raison et de liberté qu’elle veut et doit conserver à tout prix. Mais si cette assemblée avoit joint à ses rares lumières une moralité plus scrupuleuse, elle auroit trouvé le point juste entre les deux partis qui se disputaient, pour ainsi dire, la théorie publique.
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CONSIDÉRATIONS
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